VOYAGE EN HABITATS INCONNUS : LE SITE DE LA HAILLE DE POUT-BADETTE

Le site archéologique de la Haille de Pout-Badette se situe dans le cirque de Troumouse, culmine à 2000 mètres d’altitude en bord de vallée et surplombe la rive gauche du gave des Touyères qui prend sa source dans le cirque. Ce site découvert en 2015, est fouillé depuis 2016 par les équipes du responsable d’opération Guillaume Saint-Sever. Cherchant à documenter les habitats de haute montagne au néolithique, la fouille riche en informations offre également un cadre de recherche agréable. Ainsi, nous avons pu emmener 3 classes de 6e dans un voyage dans le temps, vers les habitats inconnus (ou presque) du cirque de Troumouse. 

Photo du site
©Grottes&Archéologies – Haille de Pout-Badette, Cirque de Troumouse

Après deux heures de bus, des vaches au milieu de la route, quelques épingles très serrées et un malade plus tard, les professeur·es et élèves de 6e du collège de Tournay arrivent à 1600m d’altitude. Il reste 400m à gravir, c’est parti pour la randonnée pédestre jusqu’au site archéologique. Et oui chez les archéo, la culture ça se mérite ! 

Sur le sentier, ils escaladent des rochers, traversent les ruisseaux, croisent des moutons, des vaches et des marmottes sauvages ! Après 1h30 intensive de randonnée ils aperçoivent au loin le campement de la fouille, après avoir repris des forces avec un pique-nique au milieu de cette terre verdoyante et calme, les élèves sont enfin prêts à partir à la découverte du néolithique avec un premier atelier : Visite du chantier

Le site de Troumouse qu’est-ce que c’est ? 

Relevé topographique de la zone prospectée et emplacement des secteurs de fouille. a : DTM en 2D ; b : DTM
en 3D (Relevé et infographie : F. Soula).
©Saint-Sever.Guillaume, rapport de fouilles 2017-2019

Les sondages effectués sur le site de la Haille de Pout-Badette ont mis au jour en 2016 quatre zones d’occupation concentrées dans un petit vallon, dont deux habitations sont actuellement fouillées et une troisième a été testée lors de la première année de la deuxième campagne triennale. Toutes ces structures se rattachent à une période comprise entre la fin du Campaniforme et la première phase du Bronze Ancien.

Ces habitats possèdent exactement le même type de plan, ils se présentent comme des petites maisons de 5m/6m construites en terre et bois et implantées, après terrassement, sur des murets de soubassement construits en pierres sèches, chacune possédant une dépendance circulaire adossée sur leur mur sud. 

Ces informations ont pu nous parvenir grâce aux niveaux archéologiques très bien conservés permettant l’identification des trous de poteaux mais aussi le ramassage de nombreuses céramiques, outils en pierre et bois carbonisés. Il a d’ailleurs été retrouvé des éléments de clayonnages* et de piquets partiellement brûlés.
*armature en bois des murs employée dans la technique du torchis.Reste de clayonnage visible sur la photo ci contre.

Morceau de clayonnage retrouvé dans la terre rubéfiée.
©Grottes&Archéologies – Haille de Pout-Badette, Cirque de Troumouse

On y trouve quoi ? 

On y trouvent du mobilier céramique et lithique, ils permettent de mieux documenter la période, qui pour l’heure ne possède pas de référentiel très précis. Ces éléments matériels renouvellent l’approche chrono-culturelle et en particulier les courants d’échanges entre les deux versants des Pyrénées. L’expertise du mobilier céramique et lithique, conjuguée aux datations radiocarbones, permettent d’attribuer ces ensembles à au moins trois phases distinctes, qui s’échelonnent de la fin du Campaniforme au début du Bronze ancien ; entre le XXIIIe et XXIe siècles avant notre ère.

Le mobilier lithique :

Après avoir fait le tour du chantier, les élèves ont participé à un atelier sur l’industrie lithique, ils ont pu observer des éclats de silex, et voir comment se fait la taille. 

Pour l’heure, le mobilier lithique découvert durant les campagnes est composé d’éclats, d’esquilles et de débris. Il se compose actuellement de 72 artefacts en silex découverts lors des campagnes (pour le secteur 2). L’ensemble lithique de Troumouse présente les caractéristiques des industries reconnues dans le sud de la France. On observe une production exclusive de petits éclats dont les mensurations sont généralement comprises entre 20 et 35 mm. Il est possible de suggérer que l’économie de production est tournée vers l’obtention d’éclats de petites dimensions par percussion dure directe et par percussion sur enclume et que ces derniers sont destinés, soit à être utilisés bruts, soit à être transformés en grattoirs ou en pièces esquillées. 

Le mobilier céramique 

Les collégiens ont également pu comprendre le travail du céramologue avec un atelier expliquant ce qu’est une céramique et quelles indices il est possible de dégager à partir de ces dernières. 

En ce qui concerne le site de Troumouse, la phase intermédiaire et récente de l’occupation du Secteur 1, livre une série céramique peu fournie. Dans le Secteur 2, un vase constitué de fragments en connexion a été retrouvé en dehors de l’habitation, en bordure d’une déclivité du rocher. Ce pot avait été daté après étude de ces caractéristiques visuels de la fin du Campaniforme. Cependant les résidus carbonisés de l’intérieur du vase ont été datés, donnant un intervalle compris entre le 20e et le 18e siècle avant notre ère et donc attribuables au Bronze ancien A2 ; phase non encore reconnue sur le site. Ainsi, les continuités stylistiques du Campaniforme au Bronze ancien ne sont plus à démontrer, et après les quelques comparaisons réalisées sur certaines formes ou caractères, ces derniers paraissent restés quasi-inchangés.

Conclusion de cette journée :

Après cette journée bien riche en émotions, en rencontres et en apprentissage, certains se sont risqués à poser la questions :  » Mais alors est-ce que vous savez pourquoi il y a eu des habitats dans cet endroit ? « , la réponse fut brève :  » Non, pas encore tout à fait, même si nous avons quelques pistes… »

En effet, les aménagements concernant les habitats de cette période n’ont jamais été documentés pour les Pyrénées et posent de multiples interrogations sur leurs fonctions, leur implication dans l’exploitation de ce territoire et les modifications du paysage de haute-montagne. L’intérêt de cette fouille est de mieux comprendre les motivations d’une implantation dans ce type de milieu. Et oui, qui voudrait habiter au milieu de nulle part et à une telle altitude ? 

Plusieurs hypothèses commencent à émerger : 

  • Les pratiques agro-sylvicoles (exploitation des ressources forestières et estives pour de petits troupeaux), 
  • Le rôle dans le contrôle des cols et des voies de communication,
  • Une volonté de maîtriser les échanges de métaux, les indices de métallurgie du cuivre retrouvés laissent actuellement supposer une exploitation opportuniste non spécialisée des différentes ressources disponibles. 

Pour plus d’informations sur le site archéologique de Troumouse, rendez-vous sur les pages archéologiques dédiées à la Haille de Pout sur notre site, d’autres informations ici !

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