Le plus vieux site archéologique du continent américain aurait été découvert dans le sud de la Californie…
C’est ce qu’annonce un article publié le 27 avril 2017, dans la revue Nature par une équipe dirigée par Steven R. Holen et Thomas A. Deméré, du Muséum d’Histoire Naturelle de San Diego en Californie. Il y aurait 130 000 ans, des ossements de mastodontes (Mammut americanum) auraient été exploités par éclatement sur des enclumes de pierre… Le gisement, le Cerrutti Mastodon site, a été fouillé dans les années 90 à l’occasion de la construction d’une autoroute (voir vidéo infra). Il refait parler de lui car, si les faits pouvaient être confirmés, ils feraient reculer l’histoire de la colonisation du continent de 100 000 ans !
Les analyses et expérimentations (sur os d’éléphant actuel frais) montreraient une exploitation de l’os par fracturation volontaire. Les blocs et éclats porteraient des stigmates l’utilisations comme marteaux et enclumes. Et les datations par la mesure du déséquilibre des isotopes uranium/thorium sur les os de mammouths donneraient un âge de 130 000 ans.
Mais alors ? Qui serait l’auteur de ces actions sur les ossements de mastodontes : l’Homme de Neandertal ou de Denisova ? Comment aurait-il traversé le détroit de Béring ? Pour l’instant, les seules occupations véritablement attestées sur le continent datent de 15 000 ans et sont l’œuvre de l’Homme anatomiquement moderne… La nouvelle est donc importante et il fait tout bien peser et analyser. C’est ce que proposent Jean-Jacques Hublin (paléoanthropologue), Sonia Harmand (archéologue) et Laurent Bruxelles (géoarcheologue) pour un article de presse paru dans Le Figaro le 26 avril.
À l’issue de cette revue (forcément préliminaire et avec toutes les précautions d’usage liées à ce type d’exercice), nous retiendrons ce que dit Jean-Jacques Hublin: « Pour prouver une affirmation aussi extraordinaire (…) il faudrait aussi avoir des preuves extraordinaires. Mais c’est loin d’être le cas. »
C’est ce que semble penser Sonia Harmand: « Dans l’article de “Nature”, il y a trop peu d’outils de pierre qui sont décrits et pas assez de traces caractéristiques ».
Et il y a aussi le problème des datations. Laurent Bruxelles, qui se frotte depuis des années à ces problèmes, notamment pour la datation de Little Foot en Afrique du Sud: « Le problème des datations uranium thorium sur les os est que nous ne fixons pas l’uranium de notre vivant ». De fait nous ne fixons pas l’uranium de notre vivant et il faut ensuite que le système géochimique soit clôt. Or rien n’est moins sûr ici, d’autant que les ossements sont pris dans un horizon dit BT, c’est à dire lessivé et périodiquement noyé par la nappe où les éléments peuvent transiter.
Beaucoup de doutes subsistent donc. Sur les datations notamment, pour lesquelles Laurent Bruxelles rappelle que la difficulté n’est pas de dater, mais de bien choisir ce que l’on date !
Quelques éléments de réflexions complémentaires (de très nombreux articles ont été publié dans la presse dans le monde entier), pour se faire une idée de l’importance que pourrait avoir une telle découverte et donc de toute la prudence qu’il faut garder avant de conclure :


Enfin, pour l’histoire de la découverte du site :